Les réglementations nationales et Union Européenne ont été rédigées afin de légaliser le transfert massif d'un polluant de l'air, le CO2, vers le sous-sol et les eaux souterraines alors que les principaux stockages européens se situent en mer (mer du Nord ou Méditerranée). Ceux-ci ont été facilement acceptés par les populations tandis que les projets de stockage terrestre ont fait l'objet de contestations. Cette réglementation vise à développer cette possibilité de stockage terrestre. L'acidification des nappes d'eau, la circulation de l'eau des nappes, la pollution des prélèvements d'eau dans les nappes, tout est passé sous silence quant à leur contrôle effectif par des moyens définis explicitement et quantifiés.
__________________________________
Réglementations
__________________________________
Le CO2 émis par les cheminées dans l'atmosphère est un déchet
Le code de l’environnement définit un déchet dans son Article L541-1-1 :
"Au sens du présent chapitre, on entend par : Déchet : toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire ;"
Il est manifeste que le CO2 présent dans les fumées émises par une cheminée correspond à cette définition car le détenteur vise à s’en défaire, pour ne pas dire s’en débarrasser.
Toutefois, le Gouvernement complète cette définition par un article L541-4-1 visant à sortir du statut de déchets un certain nombre de matières :
On citera pêle-mêle : les sols non excavés, les sédiments déplacés au sein des eaux de surface, la paille et les autres matières naturelles non dangereuses, les matières radioactives, les sous-produits animaux ou les produit dérivés, les explosifs déclassés placés sous la responsabilité du ministère de la défense, les substances qui sont destinées à être utilisées comme matières premières pour aliments des animaux. Comme on peut s’en rendre compte, autant de matières qui sont recyclables, stables en l'état ou traitées convenablement par certains organismes et qui ne sont surtout pas laissées à traîner dans le sous-sol à l’abandon dans le milieu naturel. Il n'est pas question de transformer un polluant de l'air en polluant du sol et de l'eau ! Stocker le CO2 dans le Dogger n'est pas un traitement de déchets, ce n'est même pas un centre d'enfouissement technique pourvu de géomembranes et de géotextiles.
Le Gouvernement soucieux d'implanter des géostockages de CO2 précise toujours dans cet article L541-4-1 : "Ne sont pas soumis aux dispositions du présent chapitre : (...) les effluents gazeux émis dans l'atmosphère ; le dioxyde de carbone capté et transporté en vue de son stockage géologique et effectivement stocké dans une formation géologique conformément aux dispositions de la section 6 du chapitre IX du livre II du titre II ;"
Le sous-sol n’a jamais constitué une capacité ou un réservoir scellé de façon totalement hermétique afin de maintenir confiné sous des centaines de bars un gaz toxique à l'état supercritique ! Nous voyons d’ailleurs que le BRGM lui-même précise dans ses propres rapports les conditions de circulation de l’eau de la nappe du Dogger. Le CO2 n'est pas dans ces conditions "effectivement stocké dans une formation géologique" puisqu'au fil des millénaires, il finira par ressortir dans l'atmosphère sur les bords de la nappe du Dogger en Meuse, en Normandie, dans les Charentes,....
Il est symptomatique d'ailleurs que le gouvernement opte pour une phase d'essai d'une injection de CO2 limitée à 100 kt par la société C-Questra dans une zone de 100 km2 centrée sur Grandpuits pour voir comment cela bouge en surface et de combien afin d'identifier le bon débit d'injection industrielle. Bref, on ne sait pas où l'on va avec un gaz toxique plus lourd que l'air!... Méthode identique à celle engagée par l'ANDRA à Bure dans la Meuse pour les déchets radioactifs nucléaires : on essaie avant de généraliser l'industrialisation à grande échelle, mais de toute façon tout est ficelé d'avance sous une apparence de concertation !
Cadre réglementaire des géostockages
L'Union européenne a adopté la directive 2009/31/CE sur le captage et le stockage du carbone (directive CSC) du 23 avril 2009. La directive CSC vise à garantir le stockage géologique du dioxyde de carbone sur le plan environnemental et encadre la sécurité juridique nécessaire pour qu'investisseurs et exploitants investissent dans des sites de stockage du dioxyde de carbone à grande échelle. Pour tout projet de stockage géologique donné, il importe : 1/ qu'il n'y ait aucun risque de fuite de dioxyde de carbone du réservoir géologique, 2/ qu'il n'y ait aucun risque de dommage à la santé publique ou à l'environnement, 3/ qu'il n'y ait pas d'effets négatifs sur les sites de stockage. La directive CSC porte principalement sur la sélection des sites de stockage du dioxyde de carbone et sur des obligations en termes de surveillance, d'autorisation, de fermeture et de post-fermeture. La directive CSC a été transposée en droit français : décret n° 2011-1411 du 31/10/11 relatif au stockage géologique de dioxyde de carbone afin de lutter contre le réchauffement climatique : modifications diverses du code de l'environnement dont introduction des articles R229-57 à R229-102.
Les articles 5 (permis d'exploration) et 6 (permis de stockage) indiquent que si une zone est jugée propice au stockage, les États membres peuvent permettre sur certaines parcelles l'exploration et le stockage du CO2, le titulaire dispose alors des droits exclusifs pour explorer et stocker le dioxyde de carbone dans ces zones désignées.
L'article 7 définit des règles sur la façon dont ces permis doivent être accordés aux opérateurs de stockage, dont la démonstration de l'expertise technique et de la capacité à répondre aux exigences financières décrites plus en détail dans les sections suivantes.
L'article 10 prévoit un examen des projets de permis de stockage par la Commission.
Les opérateurs du stockage doivent se conformer aux règles imposées par la directive CSC et sont responsables des fuites de dioxyde de carbone sur les sites de stockage en exploitation. Ces responsabilités sont transférées à l'État après la fermeture du site de stockage.
L'article 18 de la directive CSC prévoit que ces responsabilités sont transférées à l'État après un minimum de 20 ans écoulés depuis la fermeture du site de stockage. Ce transfert de responsabilité est assorti d'exigences : les preuves disponibles indiquent que le dioxyde de carbone stocké sera complètement et définitivement confiné. Cet article indique que lors de la fermeture, "il a été procédé au scellement du site et au démontage des installations d'injection" : cette opération peut se réaliser à partir de la surface, mais rien n'est indiqué concrètement sur l'isolation de l'interface entre le CO2 et la nappe d'eau du Dogger à 1 800 m de profondeur !.
L'eau continuera de s'écouler dans la nappe du Dogger entraînant le CO2 à son contact qu'elle diluera au fil du temps en s'acidifiant.
On se demande où sont passées les règles européennes de la concurrence interdisant à l'Etat français d'assurer lui-même ses propres centrales nucléaires, alors que dans ce cas, ce sera le gouvernement qui assurera la totalité des risques inhérents au stockage de CO2 sur le long terme pour le plus grand profit d'opérateurs privés ? Une centrale nucléaire est démantelée en fin de vie, alors que l'on devrait patienter quelques milliers d'années pour que le CO2 stocké repasse en totalité dans l'atmosphère sur les bords de la nappe du Dogger.
Alors que l'Union Européenne prévoit explicitement les importations de CO2 dans les pays pourvus de géostockages terrestres en provenance de pays qui ne souhaitent pas s'en doter, on ne voit pas pourquoi le gouvernement français financerait seul les études préalables à de telles infrastructures.
____________________________
Le géostockage dans la nappe du Dogger n'est pas une technologie de décarbonation. Il ne peut en aucun cas être assimilé à une énergie nouvelle renouvelable. Ce n'est certainement pas une "technologie favorable au développement durable".
Au niveau français, la loi d'accélération de la production des énergies renouvelables du 10 mars 2023 (loi Aper - loi 2023-175) et la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'énergie verte complétée par les décrets n°2024-704 du 5 juillet 2024 et n°2024-742 du 6 juillet 2024 fixent le cadre réglementaire. Ce dernier décret organise la consultation du public dans différents cas avec des modalités accélérées en citant explicitement le stockage de CO2. Le stockage géologique ne peut pas être concerné par ce décret puisqu'il s'agit d'un dépôt provisoire et non pas définitif.
En tout état de cause, il n'y a pas lieu de procéder à une consultation accélérée : il s'agit d'une question complexe qu'il convient de bien analyser dans toutes ses implications. Ce stockage n'est rien d'autre qu'une ICPE Seveso 2 classique à très hauts risques, rubrique 2970 stockage géologique de CO2.
____________________________
L'information incomplète du public
On observe que les dossiers de demande d'autorisations d'exploiter limitent l'information du public sur les questions de défense nationale comme par exemple l'article L512-7-1 du code de l'environnement : "Ne peuvent ni figurer dans le dossier de la demande d'enregistrement mis à la disposition du public, ni être communiqués des éléments soumis à des règles de protection du secret de la défense nationale ou nécessaires à la sauvegarde des intérêts de la défense nationale". Cette disposition est justifiée; toutefois, dans ce cas précis de stockage de millions de tonnes de CO2, la population ne peut pas supporter l'idée de vivre en permanence avec le risque de se trouver asphyxiée à tout moment en cas de guerre ou d'attentat dans la période de conflits généralisés actuelle au niveau mondial. Il n'est dès lors plus recevable de se retrancher derrière "des dispositifs anti-attentat sont prévus" comme mentionné lors de la commission de suivi de site de Grandpuits du 22 mai 2024 : le public doit pouvoir se convaincre de l'efficacité parfaite des dispositifs en question. Le niveau de sécurité doit être comparable à celui de la réserve d'or américaine de Fort Knox et le public doit avoir la possibilité de s'en assurer.
____________________________
En résumé, les contribuables financent les études préalables à l'implantation des géostockage de CO2 ; certaines entreprises sont nommées discrètement en profitant de ces études. On choisira de préférence de petites sociétés afin de faciliter leur faillite et de réduire les coûts à la suite d'une catastrophe constatée. Et finalement les contribuables assurent les conséquences des accidents possibles à long terme et assument les risques d'asphyxie.
____________________________
Il paraît curieux de croire que quelques articles ajoutés au code de l'environnement permettent de se soustraire aux lois de la physique, de la chimie, de la biologie, de la géologie, de l'hydrologie, de la médecine,... Nous ne développerons pas le sujet de l'effet de serre, cela nécessiterait tout un livre : la Terre n'est pas autre chose qu'une gigantesque machine thermique soumise au second principe de la thermodynamique fonctionnant entre une multitude de sources chaudes (rayonnement solaire + activité volcanique + activités énergétiques humaines) et une multitude de sources froides (rayonnement infrarouge terrestre vers l'espace sidéral + résiduel annuel irréversible de la fonte des glaces). Elle ne comporte pas d'échangeurs thermiques, de turbines ou de tubes, mais un système nuageux, une inertie thermique des terres et des océans, générant des effets thermiques et mécaniques par l'intermédiaire de l'eau et de sa vapeur. La structure de la Terre ne variant pas, le rendement de cette machine thermique n'est pas modifié : les catastrophes (effets thermiques et mécaniques) que nous constatons aujourd'hui ne feront que s'amplifier et se multiplier avec le temps par l'accroissement continu des quantités de chaleur produites par les sources chaudes (renforcement de l'efficacité du rayonnement solaire par l'effet de serre corrélé au CO2 suplémentaire émis régulièrement + accroissement des rejets thermiques dans le milieu naturel liés aux activités humaines en constante augmentation) et le maintien temporaire (fonte des glaciers et des pôles) des températures moyennes des sources froides.
Il devient nécessaire d'agir et de réduire drastiquement nos émissions de CO2 rapidement et non pas de les stocker provisoirement en attendant qu'elles ressortent dans l'atmosphère.
____________________________